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[Fsfe-france] Tribune dans Liberation sur Microsoft
From: |
Frederic Couchet |
Subject: |
[Fsfe-france] Tribune dans Liberation sur Microsoft |
Date: |
Tue, 30 Mar 2004 09:32:49 +0200 |
User-agent: |
Gnus/5.090024 (Oort Gnus v0.24) Emacs/21.3 (gnu/linux) |
Tribune parue ce matin.
http://www.liberation.fr/page.php?Article=190209
Le sacre de Microsoft
La Commission européenne fait les gros yeux à Microsoft
et entérine son monopole.
par Daniel Cohn-Bendit, député européen,vert
Frédéric Couchet, de la Fondation
pour le logiciel libre.
Dans le cadre de la procédure pour abus de position
dominante engagée par la Commission européenne à l'encontre de
Microsoft, procédure qui porte notamment sur le couplage du lecteur
de médias de Microsoft, Media Player, avec le système
d'exploitation Microsoft Windows, la multinationale américaine a
été condamnée le 24 mars dernier. La multinationale devra
s'acquitter d'une amende et commercialiser une version de Microsoft
Windows sans Windows Media Player, ainsi que dévoiler certaines
informations techniques à ses concurrents.
Les remèdes proposés par la Commission sont insignifiants : elle
entérine le monopole que Microsoft a bâti grâce à des pratiques qui
violent le traité de l'UE (art. 82), et qui lui procure la
suprématie dans un secteur stratégique de l'économie européenne. La
sanction principale (497 millions d'euros) s'apparente plus au
paiement d'une taxe qui vaut officialisation des pratiques. Le
trésor de guerre accumulé par Microsoft, 50 milliards de dollars,
lui permettra de faire face sans grandes inquiétudes, et sa
position sur le marché ne sera pas remise en cause. Bien qu'une
lettre signée de dix parlementaires américains s'indigne que l'UE
ose juger une affaire concernant au premier titre des sociétés
américaines, ces sanctions ne sont qu'un effet d'annonce. Elles ne
permettront pas l'éclosion d'un marché où la concurrence jouerait
librement.
Une concurrence effective impliquerait de permettre à n'importe
quel acteur de mettre en oeuvre des logiciels compatibles. Pour
cela, toutes les informations nécessaires à l'écriture de
programmes compatibles avec Windows doivent être rendues publiques,
sans restriction d'accès. Microsoft a en effet tiré partie du flou
de la formule «termes raisonnables et non discriminatoires»
(«reasonable and non-discriminatory terms») utilisée par le
département américain de la Justice dans une procédure similaire,
pour exclure de facto les développeurs de logiciels libres.
En effet, la livraison des interfaces n'est pas en soi suffisante
sans garantie de licences gratuites et non-discriminatoires sur
tout brevet ou copyright impliqué dans la réalisation pratique de
cette interopérabilité : si pour utiliser l'interface, il faut
utiliser un brevet, le concurrent est coincé. Ceci revient à
décrire le fonctionnement de l'écrou tout en possédant un brevet
sur le boulon.
Or Microsoft a reconnu à plusieurs reprises que son principal
concurrent était le logiciel libre, dont la production en Europe
dépasse largement celle des Etats-Unis. Le logiciel GNU/Linux
possède, selon les études IDC, le plus fort taux de pénétration sur
le marché ces dernières années. Les comparatifs récents entre les
suites bureautiques Microsoft Office et OpenOffice.org définissent
clairement les logiciels libres comme une alternative sérieuse. Il
est également permis de se demander pourquoi quatre ans d'enquête
ont été nécessaires pour établir l'abus de position dominante de
Microsoft. Cela pourrait être risible si la liberté des
consommateurs, y compris ceux du secteur public, n'était en jeu.
Une simple visite dans un hypermarché aurait permis de constater
que le droit à la concurrence et les libertés du consommateur ne
sont pas respectés. Ces particuliers s'y voient proposer des gammes
d'ordinateurs comportant au moins le système d'exploitation de
Microsoft. Acheter un ordinateur sans ce logiciel est, bien que
cela soit contraire au code de la consommation, la plupart du temps
refusé, sa vente étant liée à celle de la machine. C'est la base du
problème de la vente liée que Microsoft pratique dès le système
d'exploitation.
S'il est légitime pour un revendeur de proposer en option la
préinstallation de logiciels sur l'ordinateur, imposer leur achat
est pour le moins abusif. Il est pourtant possible de procéder
autrement : la société Sun montre l'exemple en préinstallant
plusieurs versions de son système d'exploitation Solaris sur
certaines de ses machines et en invitant l'utilisateur à effacer
celles pour lesquelles il n'achète pas de licence.
Vendre un ordinateur en imposant l'achat de logiciels est aussi
aberrant qu'imposer l'achat de l'intégrale de Dalida à chaque achat
de lecteur de musique. Dans le cas qui nous préoccupe, il y a
confusion entre le matériel et le contrat de licence d'utilisation
du logiciel. Ce dernier est un service et ne peut en aucun cas être
traité comme une composante matérielle.
Les démarches de remboursement des logiciels non utilisés,
démarches fort peu connues du grand public, quand elles sont
entamées par des particuliers et des entreprises, sont longues,
difficiles et leur succès aléatoire. Le montant du remboursement
est également aléatoire en l'absence d'un décompte détaillé du prix
de chaque élément (matériels et logiciels) fourni et vendu.
Dans sa déclaration du 18 mars 2004, le Commissaire européen Mario
Monti déclare qu'«il pense que la meilleure solution consiste à
adopter une décision qui créera un précédent fort». Pour une réelle
concurrence et pour la liberté de choix du consommateur, nous
l'encourageons à prendre effectivement des décisions fortes et
réellement efficaces, avant qu'il ne soit trop tard. En effet,
après son monopole sur les postes de travail, Microsoft travaille à
prendre possession des formats de données numériques et des mesures
techniques de protection de ces données, ce qui lui permettra
d'obtenir un monopole sur les contenus culturels. Le résultat
serait le même si on laissait une seule et même entité s'approprier
les normes VHS, DVD, CD, GSM, télé, radio... cette entité
deviendrait la seule et unique autorisée à fabriquer des télés,
radios, magnétoscopes, téléphones... Pour sauvegarder les droits du
consommateur et la libre concurrence, un vrai changement de
politique de la part de la Commission doit passer par les mesures
suivantes :
séparer matériel, système d'exploitation et applications.
permettre que d'autres sociétés puissent fournir des pilotes de
périphériques (pour les matériels type cartes vidéo, lecteurs
DVD...)
donner au consommateur le choix quant aux logiciels qu'il veut
acquérir. Si le client ne désire pas acquérir le logiciel, il n'y a
aucune raison qu'il y soit contraint.
Mitchell Kertzman, CEO de Sybase, indiquait déjà en 1997 dans 01
Informatique «je connais Microsoft, je sais qu'elle essaie de
décourager la concurrence, et que c'est de pire en pire». Il est
temps de condamner les méthodes de Microsoft avant que cette
société ne crée un monopole privé sur les technologies d'accès à la
culture et à l'information. La clef de l'économie de marché est la
liberté de sélectionner en parfaite connaissance l'offre la plus
adéquate. Ce fondement est aujourd'hui sapé.
--
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Sauvez le droit d'auteur http://eucd.info
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Frederic Couchet +33 (0) 6 60 68 89 31
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